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Théâtre en Normandie

Béatrice Hanin au Rive-Gauche : creuser des sillons harmonieux vers le public

20 Janvier 2014 , Rédigé par Vicaire François

Béatrice Hanin au Rive-Gauche : creuser des sillons harmonieux vers le public

Béatrice Hanin a pris les rênes du « Rive Gauche », il y a maintenant près d'un an et demi. Elle arrivait de Dijon où elle présidait aux destinées du Théâtre Universitaire de Bourgogne, « l'Atheneum ». Elle est venue en Normandie, où elle a fait, entre parenthèses, une partie de ses études à Rouen, avec dans ses bagages un projet s'appuyant sur deux pôles d'exigence répondant tout à la fois à une politique culturelle qui a fait de Saint-Etienne-du-Rouvray la « Ville qui danse » et à un combat contre l'illétrisme auquel la ville est particulièrement attachée.

Son arrivée aurait pu être difficile ou tout du moins compliquée. Il lui fallait, en effet, s'imposer dans une maison fortement marquée par l'empreinte de son prédécesseur sans donner l'impression d'estomper le poids d'une ombre quasi tutélaire mais en affirmant toutefois une spécificité qui lui appartenait. Difficile, en effet, de ne pas tenir compte de la personnalité de Robert Labaye dont l'attachement qu'il avait pour sa maison était à la mesure de celui que lui portaient ceux qui collaborèrent avec lui :

« C'est une question de confiance. Je devais mettre en place l'identité que j'entendais donner à cette salle. A Dijon j'avais la responsabilité d'un lieu universitaire consacré essentiellement, en plus de la programmation, à la recherche à travers l'écriture contemporaine et la danse. Au Rive-Gauche, j'y trouve les mêmes impératifs avec en plus la nécessité d'instaurer un vrai dialogue avec le tissu théâtral régional que je découvre. Plus qu'à Dijon, Saint-Etienne-du-Rouvray s'inscrit dans des actions de diffusion et d'animation pour un milieu métissé dans tous les sens du terme. La proximité avec Rouen oblige à jeter des ponts entre les sociétés différentes qui se retrouvent chez nous. D'une certaine manière ce n'est pas au public de s'adapter à la programmation mais à la programmation de tenir compte, quitte à lui apporter des correctifs en cours de route, tout à la fois de l'exigence etde l'accessibilité. J'avais le désir, après l'ambiance très particulière et un peu close de l'université, de construire mon projet avec un théâtre de ville, de jouer les complémentarités avec une agglomération et de façonner, face à elle, une véritable politique qui soit un partenariat bien plus qu'une concurrence. »

Avec une autorité souriante, il lui fallait imposer ses marques, créer de nouvelles émotions et établir avec son équipe, avec le public mais aussi avec la municipalité des liens qui en très peu de temps se sont tissés durablement.

« J'ai eu la chance de rencontrer des interlocuteurs qui m'ont fait découvrir la ville d'une manière sensible avant même que je ne connaisse vraiment le théâtre. J'ai pu appréhender les réalités sociales, éducatives, urbaines au milieu desquelles le théâtre s'impose comme un véritable centre intellectuel s'adressant avant tout et surtout à ses habitants. Le « Rive Gauche » fait partie d'un tout dont les composantes ne sont pas des transplantations un peu arbitraires mais des éléments se retrouvant dans une véritable pensée globale ».

Béatrice Hanin a pris rapidement la mesure de la maison et des idées-force qui l'animent : sa très forte connotation dans la danse contemporaine – la troisième convention avec ministère de la Culture a été signée tout dernièrement – et une action en profondeur autour de la lecture dans ce qu'elle a de plus vivant, de plus innovant. « J'avais envie de faire un retour à l'oralité qui joue tout naturellement sur la voix mais aussi sur le corps. Revenir en quelque sorte à la découverte de soi à travers les mots et le mouvement en associant le langage et le corps dans une même démarche initiatique s'adressant à toutes les générations et à tous les milieux. C'est pourquoi nous avons mis en place et nous développerons une opération « voulez-vous danser avec nous ? » qui permet au public, de quelque âge qu'il soit, de rencontrer un chorégraphe dans la perspective d'un spectacle qu'il présente ensuite, afin non pas de s'initier à l'acte chorégraphique, mais de sentir à travers sa découverte sa propre capacité à renouer avec une pratique intime du mouvement et de la gestique... »

Une démarche qui peut tout aussi bien s'appliquer à la manière d'aborder les mots et la lecture en déclenchant les mystères de la découverte et du plaisir de les maîtriser.

Dès sa première saison, Béatrice Hanin inscrit sa programmation dans cette pluridisciplinarité qui est spécifique à la maison : de la danse, beaucoup, ouverte à toutes les expressions et dont la grande diversité est une superbe approche d'un art dont l'évolution lui permet d'avoir une plus grande lisibilité. Côté théâtre, l'ancienne directeur de « L'Athénéum » a fait appel à quelques compagnies de la région qu'elle connaît bien en attendant d'inventorier le tissu régional normand qu'elle compte appréhender au fur et à mesure des spectacles qu'elle va voir. Toutefois, Schön, Catherine Delattres, Pauline Bureau s'y retrouvent comme, côté danse figure Dominique Boivin et, tout naturellement, Emmanuelle Yo-Dinh et le Centre Chorégraphique National du Havre.

Béatrice Hanin est venue à Saint-Etienne-du-Rouvray, avec un projet destiné à ce que, dit-elle, « cette maison reste belle ».

En un an de temps, elle s'y est employée en creusant des sillons harmonieux qui conduisent le public vers des découvertes et des désirs partagés.

Photo : Loïc Seron

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